top of page

C'est dans une petite ruelle pavée descendant (comme partout à Lisbonne) vers la mer de Paille que nous avons élu domicile au couchant du jour pour boire un verre. 


Le vieux tram 28 nous avait déposé bringuebalant au coeur de ce quartier profond de la ville, et le charme n'avait pas tardé à faire effet. 

​

Cela faisait bien longtemps déjà que nous n'entendions plus parler que portugais, mon appareil photo avait déclaré forfait face à sa batterie trop faible, et notre errance nous avait mené tout droit à la "tasca do Alfredo", repaire à la fraîcheur de l'ombre des immeubles. On y servait quelques bières à quatre lisboètes respirant là l'air du soir, trinquant sur une table unique posée là pour l'occasion. 

​

À l'intérieur de cet étrange café, le patron et sa femme semblaient attendre que le temps passe devant un minuscule téléviseur. À défaut d'autre table, nous nous sommes donc installés sur les marches de la rue, avons commandé quatre verres de vinho verde, et entamé une joyeuse partie de cartes accompagnée de morue frite.

C'est dans une légère ivresse proche du saudade que je me levai pour commander de nouveaux vinho verde, et que se produisit cette chose étrange et magique qu'est une conversation entre deux langues étrangères. 

Le patron avant sur le visage ce rayonnement proche du sourire qui s'épanouit durablement chez les gens d'une gentillesse profonde et indubitable. 

​

Je ne sais plus dans quelle langue il me demanda de quel pays nous venions, ni comment je lui répondis "de France", mais tandis qu'il versait le vin dans les verres je réussis à lui dire que nous aimions beaucoup Lisbonne. Il hocha la tête en répondant dans sa langue natale "Ah, muito Luz !", et je finis par être capable de lui répondre, lorsqu'il me demanda comment nous disions "Luz" en français, que c'était "Lumière".

​

Il répéta d'un accent poétique "Ah, Lumière..."

​

​

​

​

​

Lisbonne, juin 2015

bottom of page